11 mai, 2008

Le portable est insupportable

Ce matin j'écoute une émission dans laquelle on parle de tous ces objets qui ont changé notre vie et tout particulièrement du téléphone portable. Le portable a fait qu'on ne vit plus que dans l'instant, le présent. Avant on savait attendre une réponse, le temps du facteur, puis celui du répondeur ; maintenant on la veut tout de suite, on veut de l'instantané, du "temps réel", du simultané, du direct-live ! Contrairement à ce que certains craignaient (Dieu sait pourquoi ) il n'a pas aboli le lien entre les hommes, c'est même tout le contraire, il a fait de ce lien une chaîne et le boulet au bout. Un des intervenants s'étonne de ce que l'image ne soit pas plus présente dans l'usage du téléphone quand c'est désormais techniquement très possible. Naïf ! L'utilisateur du portable est un truqueur né et forcené. Ecoutez bien tous ces gens qui, en réponse au Téou ? rituel, jurent qu'ils sont au bureau quand ils sont avec vous (et parfois quelqu'un d'autre) dans le métro... Donc, l'image, personne n'y tient réellement... Car avec elle plus de mensonge possible, pas de doute non plus quand l'utilisateur du portable ne veut que de la "certitude", c'est à dire de la confiance à bon compte...
J'ai longtemps vécu il y a des années avec quelqu'un qui faisait de sa vie un roman à l'ancienne et de la mienne aussi par la même occasion et par ce qu'on appelle aujourd'hui les "effets collatéraux". Il prit amant (normal, c'est comme ça dans les romans et les films), ce dont je me foutais totalement, mais comme son goût du romanesque était teinté de profonde modernité, il ne communiquait pas avec lui par lettre ou par le téléphone fixe mais par ce tout nouvel auxiliaire de l'adultère bourgeois qu'il entendait désormais pratiquer, le portable. Ça l'excitait terriblement, où que nous fussions ensemble, de s'isoler "ostensiblement en cachette" pour chercher l'endroit où la communication était la meilleure et créer cette nouvelle ambiance un peu torve que le fixe dans sa grande banalité ne lui proposait plus. Bien entendu ça a mal tourné... Ce n'est pas d'être cocu ni la situation vaudevillesque qui m'ont très vite lassé mais la mise en scène post-moderne, tous ces accessoires qu'il sortait des coulisses, et particulièrement, ce portable qu'il s'était fait offrir par mon nouveau rival... Et bien, je vais vous faire un aveu : traumatisé, que j'ai été ! Ça fait plus de dix ans ! Je n'ai toujours pas de portable et n'en aurai jamais. Depuis cette période, je le hais, pas lui, le pauvre garçon qui n'avait pas que des défauts, mais le portable !sûrement, violemment, inexorablement !
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