25 mars, 2007

Mauriac ? J'aime !

Vous savez ce que je lis en ce moment que je n'avais pas lu depuis bien longtemps ? Je lis Mauriac. Et comme on dit actuellement, "je m'en félicite"... J'aimais déjà Mauriac étant beaucoup plus jeune. J'appréciais, adolescent, cette façon d'afficher une haine de sa propre caste pour la seule raison que c'était une caste et qu'elle se vivait ainsi. J'aimais aussi sa concision. Mon père qui m'avait incité à le lire m'avait fait comprendre le génie de Mauriac : pas la peine de traîner pour dire des horreurs ou vous faire ressentir l'odeur de la pinède... Mais je découvre aujourd'hui, et c'est normal, que c'est un peu plus compliqué que ce que je pouvais saisir à l'époque... La vie, sans doute, qui fait comprendre les choses, les hommes et les livres d'une autre manière. A ce qui me convenait dans ma jeunesse et continue à ce jour de me plaire, s'ajoute maintenant, à cette nouvelle lecture, une dimension supplémentaire : la découverte chez lui de l'esprit de bienveillance. Mauriac a la méchanceté bienveillante en ce sens que ses personnages vicieux, mauvais, pervers, tous un peu lâches et salopards ont de bonnes raisons de l'être... Humains ! forcément humains, aurait-dit Marguerite, écrivaine totalement mauriacienne dans une partie de son oeuvre (cf. les appendices de Hiroshima mon amour : parenté entre le personnage imaginé par Duras et Thérèse Desqueyroux, joués, curieusement, les deux par Emmanuelle Riva...). Famille je vous hait ? Famille et société ! Pression sociale, non-dit, secret de famille... Tout ce qu'il faut pour faire qui une empoisonneuse, qui une mère ou des enfants indignes, qui un père détestable ... Tout ça est d'une finesse extrême, d'une drôlerie tragique... Le bonhomme de surcroît était courageux et marrant, même si le Chanoine L....e, son ami d'enfance et que connaissait bien mon père disait de l'écrivain : "le problème de Mauriac, c'est qu' il n'a jamais su pécher joyeusement..." ce qui ne le rendait pas triste pour autant. On raconte cette histoire. Daniel-Rops écrivain chrétien et académicien s'était fait des burettes en or en écrivant un Jésus en son temps qui avait été un best-seller. Au moment de ce succès, Mauriac rencontre les Daniel-Rops à une soirée où Madame Daniel-Rops arbore un somptueux vison. Mauriac s'approche, les salue et quelques secondes après, effleurant du dos de la main la manche de Madame Daniel-Rops, s'exclame : " Doux Jésus ! " Mauriac c'est ça... C'est bref, dense et bien envoyé...

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