Si j'aime beaucoup les comptines, j'aime tout autant, c'est bien normal les contes pour enfants. Je viens de relire "La Princesse sur le pois" du bon Andersen. C’est l'un des plus courts qui soient. Je me permets donc puisque de toute façon ces contes sont les fruits de collectes, de le réécrire et de lui adjoindre une petite morale.
Il était une fois dans un royaume boréal un roi dont le fils, unique héritier, fut en âge de prendre femme. Il n'y avait dans ce pays aucune jeune fille dont on estimait qu'elle fût digne d'une aussi fière et juste alliance. Le Prince, alors, partit de par le monde pour chercher celle qui pourrait par ses origines, ses qualités et sa vertu l’épouser et devenir reine un jour. On lui fit une belle escorte et ses gens qui le précédaient, ministres plénipotentiaires, diplomates s'enquéraient à l'avance dans chaque royaume où il allait, dans chaque principauté, des jeunes princesses à marier. On les lui présentait. Elles étaient nobles, elles étaient belles, et parfois plus riches que lui. Mais il voulait une princesse qui surtout le fut dans sa tête, dans son coeur, par l‘esprit et la manière d'être autant que par la naissance... Il parcourut le monde connu. Fit preuve de beaucoup d'adresse pour réfuter, sans blesser leurs très nobles parents, les jeunes filles qu'on lui présentait. Il visita la Koldavie, le Royaume de Bardhanupal, des empires aux noms oubliés et dans sa fougue et sa fraîcheur, par erreur, deux ou trois républiques...
Un an après son départ en fanfare, il revint triste et abattu au royaume de son père qui le reçut un peu froidement.
- Quoi, mon fils, lui dit le roi, vous avez fait un tour de terre pour revenir seul en la notre !
- Père, je vous en demande merci, mais je ne puis pour votre honneur et pour celui de notre peuple épouser n'importe-qui, ce serait, vous en conviendrez, médiatiquement contre-productif ! lui dit le prince qui avait au cours de son périple non seulement fréquenté tous les bordels qu'il croisait sur sa route mais aussi appris une dizaine de langues dont l' étonnante langue de bois.
Le roi bien sûr y fut sensible qui pour le consoler lui offrit un beau banquet, un beau cheval bai et de belles et nouvelles armes.
Le temps passa. Mais au coeur de l’hiver, arriva en triste équipage une jeune fille presque en haillons, accompagnée d’une servante vêtue de hardes tout autant. On les eût prises pour Cucendron, Peau d'Âne ou Mélisande réunies. On les reçut comme il se doit en les conduisant aux cuisines. La jeune fille s’en offusqua.
- Quoi ? vous me menez aux communs ? Savez-vous que je suis princesse ? Dit-elle aux robustes manants qui tentaient de la sécher de force devant l‘âtre, comme on eût fumé un jambon...
Dans le palais, comme un coup de tonnerre le mot résonna ! Une princesse sous notre toit ! s’écrièrent le roi, puis la reine, le prince étant parti chasser.
A leur demande on conduisit la demoiselle devant leurs majestés qui jouaient avec leurs amis dans le grand salon et devant un grand feu à “trousse-merluche“, un nouveau jeu fort à la mode que l'on joue un peu dévêtus.
- Ainsi donc vous êtes princesse ? lui demanda alors la Reine comme toujours un peu suspicieuse.
- Sur l’honneur, oui, Madame ! lui répondit la jeune fille du ton de l’évidence.
- Soyez la bienvenue ! lui dit le roi, jovial.
Et de la confier à l’une des suivantes de la reine pour qu’elle se refît enfin une digne apparence.
On dîna ce soir joyeusement. Le prince revenu de chasse semblait moins qu' insensible aux attraits de la jeune fille et l’on se doit de reconnaître qu’elle le regardait elle aussi bien souvent.
La reine était fort avisée. Elle avait durant le repas chargé deux de ses servantes de préparer de la jeune invitée la couche. Elle fit placer sous vingt matelas et au beau mitan de ce lit un petit pois sec et fripé. Il fallut pour qu’elle y monta qu’on apportât pour la princesse au moment du coucher un escabeau de vingt-cinq marches, prétextant que c’était ainsi qu’on recevait en ce royaume tous les vrais invités de marque.
La princesse sitôt qu'on l’eut parée pour la nuit vint s’y installer. Il fallut au moins six servantes pour l’aider à gravir les marches. Épuisée par tant d’aventure elle s’endormit dès qu' allongée. Le lendemain, au petit déjeuner, dans la grande salle du palais, ses hôtes dès qu’elle parut s’enquirent de sa santé : avait-elle bien dormi ?
- Fort bien leur dit-elle de sa voix de princesse, si ce n’est que j’ai senti tout au long de la nuit comme un pavet dessous ma couche et qui m’a quelque peu mortifiée... J’ai, de ce fait, quatre-vingt bleus, autant d'escarres et quelques plaies fort douloureuses. Bref, Majestés, pour vous être honnête, je n’ai pas fermé l’oeil de la nuit.
Le roi, la reine, le prince surtout furent charmés, envoûtés. Ils tenaient là une vraie, une authentique princesse que Dieu ou le sort, c’est selon, leur avait adressée sans doute.
On retrouva ses parents, sa cour et le prince, conquis, vint leur faire sa demande.
Les noces durèrent deux mois entiers. Troubadours, jongleurs, chanteurs, cracheurs de feu, organistes et joueurs de rhombes. Toutes les cours du monde y vinrent. On dit même que les républiques, elles aussi y furent présentes, par leurs présidents et leurs légitimes épouses
Le soir des noces après qu’il fut heureux que le nouveau couple s’en fut dans la chambre nuptiale, la mariée eut une migraine qui dura pas moins de six mois et qui fit que le prince dormit dès lors sur la carpette (fort heureusement pour lui un ours de Sibérie confortable et épais) avant d'aller baiser ailleurs.
Et plus rien dès lors ne convint à la belle... Tout était trop ou pas assez... Trop chaud, trop froid, parfois trop tiède... Elle devint princesse à plein temps et telle qu‘il l‘avait désirée. Jamais contente, faisant la gueule à tout propos, ayant toujours un pet de travers, dédaigneuse, hautaine, exigeante, bref une vraie authentique chieuse.
Ils ne furent jamais heureux, et n’eurent d’ailleurs aucun enfant.
Le prince alors s’en fut trousser sur ses terres immenses et brumeuses quelques paysannes joyeuses et qui aussitôt après leur ébats lui offraient des petits pois au lards, au beurre, ou à la crème ainsi que de robustes batards...
Morale :
On a toujours besoin de petits pois... mais pas chez soi....
Il était une fois dans un royaume boréal un roi dont le fils, unique héritier, fut en âge de prendre femme. Il n'y avait dans ce pays aucune jeune fille dont on estimait qu'elle fût digne d'une aussi fière et juste alliance. Le Prince, alors, partit de par le monde pour chercher celle qui pourrait par ses origines, ses qualités et sa vertu l’épouser et devenir reine un jour. On lui fit une belle escorte et ses gens qui le précédaient, ministres plénipotentiaires, diplomates s'enquéraient à l'avance dans chaque royaume où il allait, dans chaque principauté, des jeunes princesses à marier. On les lui présentait. Elles étaient nobles, elles étaient belles, et parfois plus riches que lui. Mais il voulait une princesse qui surtout le fut dans sa tête, dans son coeur, par l‘esprit et la manière d'être autant que par la naissance... Il parcourut le monde connu. Fit preuve de beaucoup d'adresse pour réfuter, sans blesser leurs très nobles parents, les jeunes filles qu'on lui présentait. Il visita la Koldavie, le Royaume de Bardhanupal, des empires aux noms oubliés et dans sa fougue et sa fraîcheur, par erreur, deux ou trois républiques...
Un an après son départ en fanfare, il revint triste et abattu au royaume de son père qui le reçut un peu froidement.
- Quoi, mon fils, lui dit le roi, vous avez fait un tour de terre pour revenir seul en la notre !
- Père, je vous en demande merci, mais je ne puis pour votre honneur et pour celui de notre peuple épouser n'importe-qui, ce serait, vous en conviendrez, médiatiquement contre-productif ! lui dit le prince qui avait au cours de son périple non seulement fréquenté tous les bordels qu'il croisait sur sa route mais aussi appris une dizaine de langues dont l' étonnante langue de bois.
Le roi bien sûr y fut sensible qui pour le consoler lui offrit un beau banquet, un beau cheval bai et de belles et nouvelles armes.
Le temps passa. Mais au coeur de l’hiver, arriva en triste équipage une jeune fille presque en haillons, accompagnée d’une servante vêtue de hardes tout autant. On les eût prises pour Cucendron, Peau d'Âne ou Mélisande réunies. On les reçut comme il se doit en les conduisant aux cuisines. La jeune fille s’en offusqua.
- Quoi ? vous me menez aux communs ? Savez-vous que je suis princesse ? Dit-elle aux robustes manants qui tentaient de la sécher de force devant l‘âtre, comme on eût fumé un jambon...
Dans le palais, comme un coup de tonnerre le mot résonna ! Une princesse sous notre toit ! s’écrièrent le roi, puis la reine, le prince étant parti chasser.
A leur demande on conduisit la demoiselle devant leurs majestés qui jouaient avec leurs amis dans le grand salon et devant un grand feu à “trousse-merluche“, un nouveau jeu fort à la mode que l'on joue un peu dévêtus.
- Ainsi donc vous êtes princesse ? lui demanda alors la Reine comme toujours un peu suspicieuse.
- Sur l’honneur, oui, Madame ! lui répondit la jeune fille du ton de l’évidence.
- Soyez la bienvenue ! lui dit le roi, jovial.
Et de la confier à l’une des suivantes de la reine pour qu’elle se refît enfin une digne apparence.
On dîna ce soir joyeusement. Le prince revenu de chasse semblait moins qu' insensible aux attraits de la jeune fille et l’on se doit de reconnaître qu’elle le regardait elle aussi bien souvent.
La reine était fort avisée. Elle avait durant le repas chargé deux de ses servantes de préparer de la jeune invitée la couche. Elle fit placer sous vingt matelas et au beau mitan de ce lit un petit pois sec et fripé. Il fallut pour qu’elle y monta qu’on apportât pour la princesse au moment du coucher un escabeau de vingt-cinq marches, prétextant que c’était ainsi qu’on recevait en ce royaume tous les vrais invités de marque.
La princesse sitôt qu'on l’eut parée pour la nuit vint s’y installer. Il fallut au moins six servantes pour l’aider à gravir les marches. Épuisée par tant d’aventure elle s’endormit dès qu' allongée. Le lendemain, au petit déjeuner, dans la grande salle du palais, ses hôtes dès qu’elle parut s’enquirent de sa santé : avait-elle bien dormi ?
- Fort bien leur dit-elle de sa voix de princesse, si ce n’est que j’ai senti tout au long de la nuit comme un pavet dessous ma couche et qui m’a quelque peu mortifiée... J’ai, de ce fait, quatre-vingt bleus, autant d'escarres et quelques plaies fort douloureuses. Bref, Majestés, pour vous être honnête, je n’ai pas fermé l’oeil de la nuit.
Le roi, la reine, le prince surtout furent charmés, envoûtés. Ils tenaient là une vraie, une authentique princesse que Dieu ou le sort, c’est selon, leur avait adressée sans doute.
On retrouva ses parents, sa cour et le prince, conquis, vint leur faire sa demande.
Les noces durèrent deux mois entiers. Troubadours, jongleurs, chanteurs, cracheurs de feu, organistes et joueurs de rhombes. Toutes les cours du monde y vinrent. On dit même que les républiques, elles aussi y furent présentes, par leurs présidents et leurs légitimes épouses
Le soir des noces après qu’il fut heureux que le nouveau couple s’en fut dans la chambre nuptiale, la mariée eut une migraine qui dura pas moins de six mois et qui fit que le prince dormit dès lors sur la carpette (fort heureusement pour lui un ours de Sibérie confortable et épais) avant d'aller baiser ailleurs.
Et plus rien dès lors ne convint à la belle... Tout était trop ou pas assez... Trop chaud, trop froid, parfois trop tiède... Elle devint princesse à plein temps et telle qu‘il l‘avait désirée. Jamais contente, faisant la gueule à tout propos, ayant toujours un pet de travers, dédaigneuse, hautaine, exigeante, bref une vraie authentique chieuse.
Ils ne furent jamais heureux, et n’eurent d’ailleurs aucun enfant.
Le prince alors s’en fut trousser sur ses terres immenses et brumeuses quelques paysannes joyeuses et qui aussitôt après leur ébats lui offraient des petits pois au lards, au beurre, ou à la crème ainsi que de robustes batards...
Morale :
On a toujours besoin de petits pois... mais pas chez soi....
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