Je vais encore parler peinture...
Courbet pour l’Origine du Monde a procédé par amputation. Pour rendre cette femme plus humaine, plus réelle, plus sensuelle, il la débarrasse paradoxalement de ces accessoires réalistes par leur contingence que sont la tête, les bras et les jambes, pour ne garder, dans l'écrin blanc d'une chemise moite et relevée, qu’un ventre, des cuisses, des seins, un sexe. On sait le succès qui en résulte, par l’efficacité du procédé. Si l’on voulait, “braghetter” l’Origine du Monde, pas besoin de peindre sur la fameuse toison ne serait-ce qu’un voile, il suffirait seulement d’agrandir le tableau en ajoutant ce que Courbet a si judicieusement retranché : la tête, les bras, les jambes et tout “rentrerait dans l’ordre” (moral). Le scandale du Déjeuner sur l’herbe tient à la mise en oeuvre du même procédé : la soustraction, ici celle des vêtements. La femme n’est pas nue, elle est déshabillée... Nous ne dirons ici rien de l'emblématique Olympia* dont on pourrait parler pendant des lignes, pendant des heures...
Le procédé de la soustraction a donc fait ses preuves.
Il fallait pour que le nu soit encore subversif trouver autre chose. La solution étant, une fois admis qu’on ne doit plus “soustraire”, pas plus que “laisser” le corps dans son intégralité, il ne reste plus qu’à “ajouter”. Picasso le fera dans les années cinquante-soixante, en représentant à coté du sexe féminin, l’anus si soigneusement occulté jusqu’à présent dans la peinture. (Le trivial “trou du cul” étant en revanche représenté sans vergogne dans la statuaire du moyen-âge mais sans connotation volontairement érotique dans sa multiple fonction évacuatrice, chiards, pétengueules et soufflaculs ). Bellmer non plus ne s’en privera pas, poussant même la relation anecdotique dans ses “derniers retranchements”... Mais contrairement à Courbet, l’un et l’autre ne sont pas dans un état mental poussant au réalisme.
Jean-Paul Matifat a donc trouvé la solution... Il montre d’une manière réaliste une femme allongée, les cuisses suffisament écartées pour que le sexe soit bien visible, se touchant d’un doigt décidé et comme dans la Folle Complainte, "se donnant de la joie". Mais il utilise ce poncif pour détourner l’attention du spectateur de ce qui pourrait n’être qu’un détail : cet anus clairement exposé et légèrement dilaté qu’elle offre à la contemplation de tous et qui suggère, par la présence ludique du majeur qui s'active à coté, plus l' intromission que le contraire... Et c’est là que tout se déclenche, car cet anus dans sa simplicité, n’est rien moins que l’ “œil du cyclone”. Et l’on finit rapidement par ne plus voir que lui ; le geste intime (!) sollicitant sans honte la vulve épanouie passant ainsi “au second plan”... Et J-P. Matifat rejoint à sa manière le Wim Delvoye des Quatre vents et de Anal Kiss dans ce que son oeuvre sort de ses contours pour se propulser à l'évidence dans le comportement, ou le discours, ou les silences qu’elle provoque inévitablement de la part du public... Elle a donc rempli son contrat...
Tout commentaire doit donc impérativement s’arrêter-là au risque de devenir lui aussi cette part de l’œuvre selon le principe dont je parlais à l’instant ...
Ah, c'est trop tard ? C'est fait ? Tant pis...
*(sont-ce, sa jeunesse évidente, son sourire effronté, le bouquet de fleurs qui remercie, les mules qu'elle porte vaillamment, ou le petit chat noir qui choquèrent à l'époque ?).
Courbet pour l’Origine du Monde a procédé par amputation. Pour rendre cette femme plus humaine, plus réelle, plus sensuelle, il la débarrasse paradoxalement de ces accessoires réalistes par leur contingence que sont la tête, les bras et les jambes, pour ne garder, dans l'écrin blanc d'une chemise moite et relevée, qu’un ventre, des cuisses, des seins, un sexe. On sait le succès qui en résulte, par l’efficacité du procédé. Si l’on voulait, “braghetter” l’Origine du Monde, pas besoin de peindre sur la fameuse toison ne serait-ce qu’un voile, il suffirait seulement d’agrandir le tableau en ajoutant ce que Courbet a si judicieusement retranché : la tête, les bras, les jambes et tout “rentrerait dans l’ordre” (moral). Le scandale du Déjeuner sur l’herbe tient à la mise en oeuvre du même procédé : la soustraction, ici celle des vêtements. La femme n’est pas nue, elle est déshabillée... Nous ne dirons ici rien de l'emblématique Olympia* dont on pourrait parler pendant des lignes, pendant des heures...
Le procédé de la soustraction a donc fait ses preuves.
Il fallait pour que le nu soit encore subversif trouver autre chose. La solution étant, une fois admis qu’on ne doit plus “soustraire”, pas plus que “laisser” le corps dans son intégralité, il ne reste plus qu’à “ajouter”. Picasso le fera dans les années cinquante-soixante, en représentant à coté du sexe féminin, l’anus si soigneusement occulté jusqu’à présent dans la peinture. (Le trivial “trou du cul” étant en revanche représenté sans vergogne dans la statuaire du moyen-âge mais sans connotation volontairement érotique dans sa multiple fonction évacuatrice, chiards, pétengueules et soufflaculs ). Bellmer non plus ne s’en privera pas, poussant même la relation anecdotique dans ses “derniers retranchements”... Mais contrairement à Courbet, l’un et l’autre ne sont pas dans un état mental poussant au réalisme.
Jean-Paul Matifat a donc trouvé la solution... Il montre d’une manière réaliste une femme allongée, les cuisses suffisament écartées pour que le sexe soit bien visible, se touchant d’un doigt décidé et comme dans la Folle Complainte, "se donnant de la joie". Mais il utilise ce poncif pour détourner l’attention du spectateur de ce qui pourrait n’être qu’un détail : cet anus clairement exposé et légèrement dilaté qu’elle offre à la contemplation de tous et qui suggère, par la présence ludique du majeur qui s'active à coté, plus l' intromission que le contraire... Et c’est là que tout se déclenche, car cet anus dans sa simplicité, n’est rien moins que l’ “œil du cyclone”. Et l’on finit rapidement par ne plus voir que lui ; le geste intime (!) sollicitant sans honte la vulve épanouie passant ainsi “au second plan”... Et J-P. Matifat rejoint à sa manière le Wim Delvoye des Quatre vents et de Anal Kiss dans ce que son oeuvre sort de ses contours pour se propulser à l'évidence dans le comportement, ou le discours, ou les silences qu’elle provoque inévitablement de la part du public... Elle a donc rempli son contrat...
Tout commentaire doit donc impérativement s’arrêter-là au risque de devenir lui aussi cette part de l’œuvre selon le principe dont je parlais à l’instant ...
Ah, c'est trop tard ? C'est fait ? Tant pis...
*(sont-ce, sa jeunesse évidente, son sourire effronté, le bouquet de fleurs qui remercie, les mules qu'elle porte vaillamment, ou le petit chat noir qui choquèrent à l'époque ?).
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