Connaissez-vous Istanbul ? Vous êtes-vous promené du coté d’Aksaraÿ, de Karaköy, de Péra, avez-vous gravi la colline sur la Corne d’or pour vous reposer un moment dans le jardin de la maison de Pierre Loti ? Oui sans doute. Mais avez-vous remarqué que la petite mosquée qui jouxte le palais de Dolmabaçe ressemble étonnamment avec ses consoles retournées à une église baroque, que la tour de Galata est bien génoise pour être honnêtement ottomane, que les remparts de briques rouges ont un vieux parfum d’Italie. Avez-vous traversé le grand pont sur le Bosphore pour vous rendre à Üsküdar, qui est comme chacun sait à l’autre bout du monde : en Asie ; vous rendez-vous compte ? En-A-sie... Vous allez alors plus au sud à Ephèse dont les habitants furent harcelés jadis par les courriers de ce bon Saint Paul qu’en bon chrétien vous aimez tant... vous y verrez une petite maison où mourut votre bonne Sainte Vierge dont on a oublié qu‘elle était assez peu occidentale... Vous y verrez aussi des ruines... grecques. Plus grecques, il n’y en a qu’en Grèce et encore... D’Izmir à Trébizonde, d’Üsküdar à Gaziantep : des villes grecques partout, en ruine certes, mais grecques tout de même... ou pire encore des ruines romaines... Cette Turquie dont on veut vous faire croire qu’elle serait orientale depuis la nuit des temps est marquée dans sa pierre et dans son sol par cet occident paradigmatique que vous souhaitez à tout prix préserver en en réduisant les frontières. Ce rêve de Troie que fit Schliemann, il le fit en Turquie. Cette fameuse culture occidentale est donc née ici autant que dans le Péloponnèse... L’ignorez-vous ou faites-vous semblant ?
Et les turcs ? En connaissez-vous? Savez vous qu’ils peuvent être grand(e)s, blond(e)s, minces, aux yeux bleus ? Savez-vous que dès les années soixante-dix on pouvait rencontrer à Kesan un soldat (en garnison dans cette ville frontière, salut Müfit, si tu te reconnais !) qui comme nombre de ses amis istanboulitains parlaient un français que bien des français ne parlent pas. Il n’y a pas de raison qu’il y en ait moins aujourd’hui. Savez vous qu’à Kesan encore en 1969, quand vous tombiez en panne d’auto on vous hébergeait pendant huit jours et on vous traitait comme un roi... Savez-vous que la Turquie est une mosaïque d’ethnies riches de cultures diverses. Savez vous que les femmes françaises étaient encore sous tutelle et ne sortaient pas "en cheveux" que les femmes turques dévoilées depuis belle lurette votaient déjà depuis vingt ans dans un pays profondément laïc où le seul culte apparent est ce qui reste de celui d’Atatürk...
Alors, bien sûr : l’Islam... Ah l’Islam! ... le musulman, le vilain, le dangereux, l’arabe même s’il ne l’est pas, le nouveau bolchevique, sa bombe entre les dents, de l’anthrax plein le kéfié, du plutonium dans les babouches... et son projet sournois d’islamiser l’Europe puis l’Occident en douce, et bien entendu celui de remplacer nuitamment le coq de notre clocher par un croissant et une étoile et de vous circoncire par derrière en vous faisant réciter, la Kalachnikof sur la gorge, la Sourate de la Vache... Avez-vous déjà fêté Novruz dans le Kurdistan avec des amis kurdes, pris une cuite à Ankara, à Marmaris ou sur les bords du lac de Van avec des amis turcs ? On peut avoir des amis turcs et des amis kurdes sans vergogne. Avez-vous, selon vos goûts, fait des folies de vos corps avec des turcs de l’un ou de l’autre sexe ? Savez-vous que Zeki Müren, la plus grande star de la chanson turque, est non seulement un chanteur admirable mais aussi l’un des plus anciens et des plus courageux travestis du monde et ce ouvertement, sans problème, et que c' est sans doute désormais et depuis quelques jours plus facile d’être homo à Istanbul qu’à Varsovie. L’Islam très soufi des turcs pourrait donner des leçons de tolérance à bien des pensionnaires du Vatican et à leurs épigones...
Savez-vous que depuis la chute du mur plus de deux cents millions de turcophones ont renoué des liens qui n’existaient plus depuis celle de l’empire ottoman, que de Baku jusqu’à la frontière chinoise on peut parler turc... et que cela vaut peut-être le coup d’y réfléchir... Mais il se trouve que nos amis libéraux professionnels n’ont pas compris que du Bosphore au Karakoram il y avait un marché... Tant pis.... Tant mieux...
Oui je sais, je n’ai pas parlé des Arméniens. Un peu de patience. Laissons lui le temps. Combien en avons nous mis pour reconnaître la culpabilité du gouvernement de Vichy ? Et ne vient-on pas a contrario de faire à l’Assemblée Nationale l’apologie des vertus civilisatrices de la colonisation française au Maghreb ?
Pour ce qui est des droits de l’homme, effectivement il y a encore à revoir... Néanmoins, des progrès ont été faits qu’il serait idiot de nier . Mais si les droits de l’homme, ça consiste à avoir celui de cramer à Paris avec ses enfants dans un hôtel insalubre parce qu’on est noir, de perdre son job parce qu’une entreprise florissante licencie, et mille autres joyeusetés du même tabac, on peut discourir longtemps sur la chose...
La gauche ne veut pas de la Turquie pour des raisons humanitaires. ( La droite n’en fait pas une affaire )
La droite ne veut pas de la Turquie pour des raisons qui s’apparentent au droit du sol.
( La gauche fait l’impasse sur la question).
Le plus inquiétant dans l’affaire, c’est que Chirac est pour... "naturellement", bien sûr, "forcément" aurait dit Duras.... Je ne vais pas être contre pour autant.
Et puis, enfin, avez-vous autrefois lu Pierre Loti ?
Et surtout, aujourd’hui, avez-vous lu Orhan Pamuk ?
Lisez le "Livre Noir", d’O. Pamuk, vous comprendrez que la Turquie est bien, malgré les dénégations environnantes, un pays fait d’un peuple finalement banalement européen.
Et les turcs ? En connaissez-vous? Savez vous qu’ils peuvent être grand(e)s, blond(e)s, minces, aux yeux bleus ? Savez-vous que dès les années soixante-dix on pouvait rencontrer à Kesan un soldat (en garnison dans cette ville frontière, salut Müfit, si tu te reconnais !) qui comme nombre de ses amis istanboulitains parlaient un français que bien des français ne parlent pas. Il n’y a pas de raison qu’il y en ait moins aujourd’hui. Savez vous qu’à Kesan encore en 1969, quand vous tombiez en panne d’auto on vous hébergeait pendant huit jours et on vous traitait comme un roi... Savez-vous que la Turquie est une mosaïque d’ethnies riches de cultures diverses. Savez vous que les femmes françaises étaient encore sous tutelle et ne sortaient pas "en cheveux" que les femmes turques dévoilées depuis belle lurette votaient déjà depuis vingt ans dans un pays profondément laïc où le seul culte apparent est ce qui reste de celui d’Atatürk...
Alors, bien sûr : l’Islam... Ah l’Islam! ... le musulman, le vilain, le dangereux, l’arabe même s’il ne l’est pas, le nouveau bolchevique, sa bombe entre les dents, de l’anthrax plein le kéfié, du plutonium dans les babouches... et son projet sournois d’islamiser l’Europe puis l’Occident en douce, et bien entendu celui de remplacer nuitamment le coq de notre clocher par un croissant et une étoile et de vous circoncire par derrière en vous faisant réciter, la Kalachnikof sur la gorge, la Sourate de la Vache... Avez-vous déjà fêté Novruz dans le Kurdistan avec des amis kurdes, pris une cuite à Ankara, à Marmaris ou sur les bords du lac de Van avec des amis turcs ? On peut avoir des amis turcs et des amis kurdes sans vergogne. Avez-vous, selon vos goûts, fait des folies de vos corps avec des turcs de l’un ou de l’autre sexe ? Savez-vous que Zeki Müren, la plus grande star de la chanson turque, est non seulement un chanteur admirable mais aussi l’un des plus anciens et des plus courageux travestis du monde et ce ouvertement, sans problème, et que c' est sans doute désormais et depuis quelques jours plus facile d’être homo à Istanbul qu’à Varsovie. L’Islam très soufi des turcs pourrait donner des leçons de tolérance à bien des pensionnaires du Vatican et à leurs épigones...
Savez-vous que depuis la chute du mur plus de deux cents millions de turcophones ont renoué des liens qui n’existaient plus depuis celle de l’empire ottoman, que de Baku jusqu’à la frontière chinoise on peut parler turc... et que cela vaut peut-être le coup d’y réfléchir... Mais il se trouve que nos amis libéraux professionnels n’ont pas compris que du Bosphore au Karakoram il y avait un marché... Tant pis.... Tant mieux...
Oui je sais, je n’ai pas parlé des Arméniens. Un peu de patience. Laissons lui le temps. Combien en avons nous mis pour reconnaître la culpabilité du gouvernement de Vichy ? Et ne vient-on pas a contrario de faire à l’Assemblée Nationale l’apologie des vertus civilisatrices de la colonisation française au Maghreb ?
Pour ce qui est des droits de l’homme, effectivement il y a encore à revoir... Néanmoins, des progrès ont été faits qu’il serait idiot de nier . Mais si les droits de l’homme, ça consiste à avoir celui de cramer à Paris avec ses enfants dans un hôtel insalubre parce qu’on est noir, de perdre son job parce qu’une entreprise florissante licencie, et mille autres joyeusetés du même tabac, on peut discourir longtemps sur la chose...
La gauche ne veut pas de la Turquie pour des raisons humanitaires. ( La droite n’en fait pas une affaire )
La droite ne veut pas de la Turquie pour des raisons qui s’apparentent au droit du sol.
( La gauche fait l’impasse sur la question).
Le plus inquiétant dans l’affaire, c’est que Chirac est pour... "naturellement", bien sûr, "forcément" aurait dit Duras.... Je ne vais pas être contre pour autant.
Et puis, enfin, avez-vous autrefois lu Pierre Loti ?
Et surtout, aujourd’hui, avez-vous lu Orhan Pamuk ?
Lisez le "Livre Noir", d’O. Pamuk, vous comprendrez que la Turquie est bien, malgré les dénégations environnantes, un pays fait d’un peuple finalement banalement européen.
1 commentaire:
"Avez-vous, selon vos goûts, fait des folies de vos corps avec des turcs de l’un ou de l’autre sexe ?"
Oui.
Bon sang! Vous écrivez bien, êtes engagé ou ée, ça m'importe pas. Vraiment heureuse de vous lire déjà ou enfin.
Zeki Müren
Orhan Pamuk
Pierre Loti
J'y vais, à la découverte.
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