Onze ans. Douze ans ? et déjà la vie pourrie par les t.o.c. Oh, bien sûr, maman elle-même sérieusement atteinte vous pousse à vous laver les mains, un peu trop... Elle n'est pas la seule d'ailleurs, d'autres dans l'entourage se chargent, sans méchanceté aucune, juste pour rigoler, d'en rajouter une louche. Tout dans votre vie est réglé par des rituels, des rituels sans cesse réinventés, nouveaux, évolutifs, ce serait trop simple si c'étaient toujours les mêmes. On croit ainsi en maîtriser un et hop, il devient de facto obsolète, inopérant pour conjurer la catastrophe imminente sur vous ou ceux qui vous sont chers, laissant la place à un nouveau plus astreignant encore... Vous recommencez à lire à son début votre texte cinq fois dix fois avant d'arriver au bout d'un seul trait. Vous commencez d'écrire votre page, mais arrivé à un moment fatal et imprévu, vous faites de votre main crispée et qui fatigue la tache, la faute, le truc, le geste à coté, tabou, la pensée incongrue, qui fait qu'il faut tout recommencer. Et plus vous recommencez plus vous devez recommencer... Votre trajet pour vous rendre à l'école devient une odyssée, un labyrinthe... Les lieux à éviter, les lignes qu'il faut suivre, le pied gauche, le pied droit, et le nombre de pas...
La vie est un enfer où tout se compte, se mesure et surtout, se recompte et se remesure à la moindre inattention. Tout ça lié à la religion, la religion ritualisée, c'est normal, c'est son truc. En bon petit chrétien, vous dites votre chapelet... mais en cours de route votre pensée divague, une mouche sur le carreau, une pensée impure et vous devez repartir du début, vous condamnant aussi à une dizaine de plus ; ça prend un temps fou que vous ne consacrez pas à des choses utiles et de bon sens, vos devoirs, vos leçons par exemple... Comment faire quand l'hostie vous colle au palais ? Doit-on pour vraiment être à jeun avant la communion éviter d'avaler la moindre goutte de salive. Et puis, effets collatéraux, les craintes que l'on a, les indicibles peurs... De devenir aveugle, par exemple... Les deux aveugles qu'on connaît enseignent la musique au collège. Ils sont laids, ils sont nuls, méchants et ils sont dépendants... L'horreur, quand on est môme. Et l'on attend son bus quand passe un fou qui vous dit en vous regardant dans les yeux "toi tu seras aveugle !" L'a-t-il dit ou a-t-on cru l'entendre, peu importe, le résultat est le même. On devient fou petit à petit et personne ne le voit... personne ne comprend pourquoi, parasité comme vous l'êtes, vos résultats scolaires sont incertains ni que vous êtes en grand danger car vous êtes votre propre et infatigable tourmenteur qui vous interdit sous peine de châtiment, voire de mort d'en parler à quiconque...
Alors, vous avez du pot car au bout du compte vous avez un instinct de conservation chevillé au votre corps, ce corps qui déjà se transforme et annonce des plaisirs à venir qu'il ne faut de toute évidence en aucun cas louper. Et curieusement c'est la religion qui va vous sauver... Oh, mais pas, mais alors vraiment pas de la manière prévue... On vous fait faire votre communion... L'horreur ! rituels, compulsions... Même la montre, le stylo quatre couleurs n'y font rien... Vous n'en pouvez plus... Alors vous n'avez pas le choix.. Soit vous vous jetez dans le Clain, mais comme vous avez vu un jour un noyé qu'on en ressortait, ce ne sera pas votre choix. Et chemin faisant, vous avez une autre idée... Vous avez onze ans et vous n'en pouvez plus, car vous ne pouvez même pas en parler... Si Dieu auquel vous ramène chacun de vos rituels de chaque instant , tout ce qui vous rend la vie impossible existe, et bien on va voir ce qu'on va voir... Quelques mois après la "communion" il y a la "confirmation", sorte de piqûre de rappel de la foi catholique et de son église. Alors on n'a pas le choix. On va crever ? D'accord mais dans le bruit et la fureur. Alors on tente un coup. Rien de tel qu'un bon blasphème pour déclencher l'ire divine. On ne mourra pas suicidé, on mourra foudroyé ! Et le jour venu, on fait un peu le pari de Pascal mais à l'envers et par l'action... Et l'heure venue, de cracher en douce l'hostie qui empoisonne... On s'attend à ce qu'un éclair vous terrasse à travers la voûte effondrée ... on en rêve ! Des nèfles...
Dieu n'existe pas ou Dieu vient de vous prouver qu'il existe et que c'est un bien brave homme... Vous vous sentez léger... Le cauchemar prend fin par la profanation un dimanche matin au beau milieu de la messe.
Dès la sortie, vous gambadez, sur les trottoirs, vous ne comptez plus vos pas, vous ne comptez plus rien, d'ailleurs. Compter... même quand il le faudrait vous ne pouvez plus le faire... Vous êtes fier d'une chose que vous ne pouvez pas dire, autant que vous cachiez vos tourments avec soin. Vous revenez de loin... Vous êtes bien. Plus jamais on ne vous aura, sur ce terrain là, c'est certain.
La vie est un enfer où tout se compte, se mesure et surtout, se recompte et se remesure à la moindre inattention. Tout ça lié à la religion, la religion ritualisée, c'est normal, c'est son truc. En bon petit chrétien, vous dites votre chapelet... mais en cours de route votre pensée divague, une mouche sur le carreau, une pensée impure et vous devez repartir du début, vous condamnant aussi à une dizaine de plus ; ça prend un temps fou que vous ne consacrez pas à des choses utiles et de bon sens, vos devoirs, vos leçons par exemple... Comment faire quand l'hostie vous colle au palais ? Doit-on pour vraiment être à jeun avant la communion éviter d'avaler la moindre goutte de salive. Et puis, effets collatéraux, les craintes que l'on a, les indicibles peurs... De devenir aveugle, par exemple... Les deux aveugles qu'on connaît enseignent la musique au collège. Ils sont laids, ils sont nuls, méchants et ils sont dépendants... L'horreur, quand on est môme. Et l'on attend son bus quand passe un fou qui vous dit en vous regardant dans les yeux "toi tu seras aveugle !" L'a-t-il dit ou a-t-on cru l'entendre, peu importe, le résultat est le même. On devient fou petit à petit et personne ne le voit... personne ne comprend pourquoi, parasité comme vous l'êtes, vos résultats scolaires sont incertains ni que vous êtes en grand danger car vous êtes votre propre et infatigable tourmenteur qui vous interdit sous peine de châtiment, voire de mort d'en parler à quiconque...
Alors, vous avez du pot car au bout du compte vous avez un instinct de conservation chevillé au votre corps, ce corps qui déjà se transforme et annonce des plaisirs à venir qu'il ne faut de toute évidence en aucun cas louper. Et curieusement c'est la religion qui va vous sauver... Oh, mais pas, mais alors vraiment pas de la manière prévue... On vous fait faire votre communion... L'horreur ! rituels, compulsions... Même la montre, le stylo quatre couleurs n'y font rien... Vous n'en pouvez plus... Alors vous n'avez pas le choix.. Soit vous vous jetez dans le Clain, mais comme vous avez vu un jour un noyé qu'on en ressortait, ce ne sera pas votre choix. Et chemin faisant, vous avez une autre idée... Vous avez onze ans et vous n'en pouvez plus, car vous ne pouvez même pas en parler... Si Dieu auquel vous ramène chacun de vos rituels de chaque instant , tout ce qui vous rend la vie impossible existe, et bien on va voir ce qu'on va voir... Quelques mois après la "communion" il y a la "confirmation", sorte de piqûre de rappel de la foi catholique et de son église. Alors on n'a pas le choix. On va crever ? D'accord mais dans le bruit et la fureur. Alors on tente un coup. Rien de tel qu'un bon blasphème pour déclencher l'ire divine. On ne mourra pas suicidé, on mourra foudroyé ! Et le jour venu, on fait un peu le pari de Pascal mais à l'envers et par l'action... Et l'heure venue, de cracher en douce l'hostie qui empoisonne... On s'attend à ce qu'un éclair vous terrasse à travers la voûte effondrée ... on en rêve ! Des nèfles...
Dieu n'existe pas ou Dieu vient de vous prouver qu'il existe et que c'est un bien brave homme... Vous vous sentez léger... Le cauchemar prend fin par la profanation un dimanche matin au beau milieu de la messe.
Dès la sortie, vous gambadez, sur les trottoirs, vous ne comptez plus vos pas, vous ne comptez plus rien, d'ailleurs. Compter... même quand il le faudrait vous ne pouvez plus le faire... Vous êtes fier d'une chose que vous ne pouvez pas dire, autant que vous cachiez vos tourments avec soin. Vous revenez de loin... Vous êtes bien. Plus jamais on ne vous aura, sur ce terrain là, c'est certain.
Et vous aimez ce dieu auquel vous ne croyez plus...
7 commentaires:
Tout est parti, tout est dogme, rien ne permet l'écart même bienfaiteur. Et c'en est ainsi partout. Si ça ne rassure pas, ça génère un mauvais pouvoir. Et voilà où en est l'homme désormais.
hummmm.. merci mon cher.
la lotta continua
je suis allée voir récemment du coté de l'entelechie pour essayer comprendre pourquoi on est encore et toujours en vie sans être devenus fous. Entelechie vous dis je...
http://fr.wiktionary.org/wiki/entéléchie
...Suis scié.
Alors, ça , c'est un p... de texte.
Tout ça pour te dire, Cher François, toi qui vois des momes tous les jours, qu'il ne suffit pas ne n'être pas battu pour être heureux... Qu'on peut-être choyé et salement dans la merde... Et que cette histoire n'est pas qu'une histoire de son temps. Je crains qu'elle soit toujours sous une forme ou un autre l'actualité de bien des gamins...
Merci de ton commentaire.
Oh le putain coup de blues...c'est l'approche de Noel ou alors du solstice d'hiver ? PP tu n'aurais pas un coup d'heliotropisme ? la religion, le spleen ,l'obscurité....eh bien vivement 2010 et vive la laïque come on disait il y a ..longtemps
non non cher Gerlandais, pas de coup de blues, mais le simple témoignage d'un état et de la libération de cet état et comme toute libération plutôt jubilatoire....
Cher pp,
Quel beau texte!
bises angevine
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