02 septembre, 2009

Les petits maîtres de la veulerie

Je suis depuis quelques jours sur le blog d'Orlando de Rudder une discussion qui m'intéresse. On tenterait actuellement de ressortir des culs-de-basse-fosse de l'Histoire des écrivains qui ont laissé dans les mémoires plus le souvenir des exactions qu'ils ont commises en de troubles périodes que celui de leur oeuvre littéraire. "Les salauds talentueux"... Bien sûr il y a d'abord Céline, l'emblématique, qui eut le bon goût comme Béraud par exemple de montrer son talent avant d'être une ordure et qu'on n'attaque pas sur le plan littéraire, 'l'Affaire Céline", est réglée depuis longtemps, la pompe à polémique tarie à la source, le fond de commerce clos faute de nouveautés.
Alors, on profite de l'arbre gigantesque pour prétendre qu'il cacherait une forêt... une forêt peuplée de nains dont on voudrait nous faire croire au prétexte qu'étant d'aussi, voire de plus grandes enflures que Céline, leur talent serait proportionnel à leur insigne saloperie...
Mais la question reste entière : en quoi le fait d'être passé par le poteau d'exécution pour collaborationnisme et antisémitisme notoires ou d'y avoir échappé de justesse serait-il une forme de plus value artistique... Car si comme cela s'est (rarement) produit on peut être une fripouille et avoir du génie, il n'y a entre ces deux faits aucune relation de cause à effet... Alors, laissons ces obscures petits maîtres de la veulerie ordinaire ou extra-ordinaire, ces plumitifs oiseux de la haine qui tue, moisir dans leurs cartons... ils resteront des fumiers avant d'être écrivains. Quand à ceux qui veulent, pour se faire mousser ou pour quelques profits, les extraire de la fange où ils stagnent, qu'ils sachent qu'à remuer la merde on prend toujours le risque de se souiller...

5 commentaires:

  1. Votre message donne à réfléchir. Je ne crois pas célébrer Rebatet parce qu'il fut la plume fameuse de "Je suis partout" ou l'auteur de l'ignoble Décombres. Les deux étendards, malgré ses longueurs, est sublime, il ne s'encombre pas de la petite haine, de la "veulerie ordinaire".
    Vous pointez quelque chose de juste en évoquant entre guillemets les "salauds talentueux" le monde, le beau monde raffole de formules. L'époque est à l'oxymore ou ce qui s'en approche.
    Je ne pense pas que mon jugement soit parasité par l'infâme du personnage, par une piètre tentative de démarcation. Je dis "je ne pense pas" parce qu'on est toujours incertain sur soi-même.
    Kleber-Haedens est un écrivain très moyen, très comme il faut, très fatiguant malgré sa vie de salaud.

    Mais à l'inverse de ce que vous écrivez, est ce qu'avoir été une fripouille "un fusillé de l'aube" mériterait que l'on occulte toute l'oeuvre ? De petits humains ne pourraient-ils pas être de grands artistes ? Vous évoquiez ailleurs la nécessité de faire disparaître le nom pour rendre l'amour de l'Art plus sincère, moins poseur. Vous avez tout à fait juste.
    Vous savez Camus qui n'est pas le dernier des crétins célébrait lui aussi Les deux étendards. Je ne suis pas moutonnant, je l'ai découvert tout à l'heure par le blog d'orlando...

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  2. Boudi dear,

    Je ne souhaitais pas transporter ici ce débat, la question de la tombe de Céline me préoccupe plus maintenant que la réédition de Rébatet ou consort.

    Néanmoins, vous aurez remarqué que je ne me situe pas comme critique littéraire (je n'en ai ni le talent ni l'envie), mais comme un simple blogueur attentif à ce qui pourrait devenir un "phénomène sociétal", comme on dit pour faire chic, à savoir l'exhumation à la mode de certains littérateurs au rebut pour la simple raison qu'ils seraient sulfureux...(Quand on sait qu'un Nabe se veut leur héritier...)

    Pour ce qui est de l'oxymoron, ce n'est qu'une figure de style, en aucun cas un argument moral... Et vous savez très bien que dans l'impossibilité de rendre public un texte sans citer son auteur, on se trouve confronté de fait, qu'on aime ça ou non, à un problème éthique en oeuvrant à une certaine, (que vous le vouliez ou non, vous y participez fût-ce en toute innocence) réhabilitation par la prétendue valeur de l'oeuvre.

    Vous m'avez ensuite mal lu, car je n'ai jamais demandé que ces auteurs fussent "niés"... Leur réputation perdure. Je pense simplement qu'en ces temps actuels où la conscience politique quand elle existe irait plutôt chercher sa nourriture dans la pensée qui fut la leur, ce n'est pas la peine d'aider à l'ouverture du caveau des vampires...

    Vous aimez "Les deux étendards" dites vous. C'est tout à fait votre droit,et vous n'avez pas besoin de la caution de Camus pour le revendiquer.

    En revanche sachez que, ce disant, vous serez toujours amené d'une manière ou d'une autre à dire en connaisseur : "d'accord c'est un salaud, mais quel grand écrivain !" et ce faisant minorer auprès d'âmes un peu faibles sa médullaire saloperie...

    Ignorer les "Deux étendards"
    est une chose moins grave que de se dire "oui mais quel grand écrivain".

    Vous allez me dire mais alors ; Céline... Oui c'est vrai, Céline...
    Ah, si l'on était égaux, fut-ce devant l'ignominie...

    Et puis, honnêtement, y-a-t-il urgence à lire Rebatet ou Brasillach quand on n'a pas terminé Lucrèce, Ovide, ou même Aulu-Gelle ?

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  3. Anonyme11:04 PM

    Lire sur mon blog l'extrait des Deux étendards que Boudi m'a envoyé! D'accord, ce n'est qu'un extraoit mais il est d'un conforemisme, d'une connerie veujle assez spectaculaires.
    Camus n'est pas forcément une référence.sans aller jusqu'à ce qu'en disait Brochier et malgré quelques fulgurances, cez n'est pas ma tasse de thé.quant à ses goûts littéraires... Mais bon: c'est bien au-dessus de Rebatet! Je crais que ceux qui crièrent au sublime n'aient été victime du syndrome ordinaire du salaud talentueux...
    Mais pourquoi ne nous trouvent -ils pas un dégueulasse bien stalinbien, un coco répugnant ayant écrit?ca ne manque pas! Et certains, vu leur culture, savaient tourner les phrases! On deevrait bien poouvoir faire un "coup" médiatique à la Rebatet avec un stalinien pourri! Ca changerait...
    Mais non, ça ne marcherait pas: on préfère les ordures de droite aux pourris du communisme! C'est un genre, bien plus chic... pourquoi? Bonne question!
    Aulu-Gelle est épatant! une sorte de joyeux foutoir réjouissant...Quant à Ovide, c'est carrément ma passion! Je le lisais, avec Heredia et REnart à mes mômes, le soir ...
    HorsLandau

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  4. Je crois comprendre ce que vous voulez dire. Reprenez moi si je me trompe (promis c'est mon dernier message ici, je comprends bien que vous ne vouliez pas plus longtemps respirer l'ignominie de Rebatet) mais en somme pour vous le talent littéraire de Rebatet supposé ou réel ne doit pas être célébré ou reconnu parce que les foules risqueraient un dangereux amalgame entre l'écrivain ainsi réhabilité et les idées de "Décombres". C'est à dire que cet ouvrage ne serait que le cheval de Troie d'une pensée affreuse ? Que libérer l'artiste de l'oubli c'est prendre le risque -risque que nous ne pouvons nous permettre de prendre- de libérer le journaliste, l'idéologue et le collaborationniste.
    Je peux saisir, de là à être d'accord il me faut vieillir, désespérer un peu plus que vous. Ca vient avec l'âge, comme tout.

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  5. Oui, c'est à peu près ce que je dis.
    Mais en l'occurrence c'est moins la question du talent supposé ou non de l'écrivain (à l'instant présent , je m'en tape de Rebatet ou d'un autre)dont je pense qu'elle serait ici en jeu que l'utilisation par certains d'une possible "requalification" du bonhomme à des fins politiques sournoises...

    Je vais vous donner un exemple : quand des gougnafiers veulent redorer l'image de Mussolini, (oui-oui, y en a encore qui osent!) ils rappellent qu'il fit assécher les marais-pontins, quand à Hitler , certains vous rappelleront que vous roulez encore en Allemagne sur les extraordinaires autoroutes qu'ils fit construire... Pourquoi je ne parle pas de Staline? Parce que personne ne cherche à le dénaphtaliniser...

    Maintenant je vais vous dire un truc, puisque dès que ça glisse, vous vous raccrochez aux branches de votre jeunesse, la jeunesse n'a rien à voir là dedans... Vous rendez-vous compte que d'un coté vous avancez "l'étendard" de votre âge quand de l'autre vous vous faites le héraut d'un écriveur caractéristique d'un système de pensée vieillotte et horriblement conformiste... Vous avez vingt ans répétez-vous ? j'ai peine à le croire...
    Allez ! au lieu de vous adonner à une forme de délectation morose, Réveillez- vous ! lisez Mauriac, et Gide tout simplement ! Un peu de subversion vous sera salutaire, en souhaitant que ce ne soit pas trop tard...

    Vale !

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