24 juin, 2013
"faut jamais remettre à demain, ou la procrastination est ennemie de la musique!"
C'est dans les années soixante-dix finissantes . Un excellent ami vient de créer avec sa fort légitime épouse son propre label, et ils ont bien fait car d'année en année il édifieront un superbe et fort original catalogue et passeront sans problème de la galette opulente avec ses belles pochettes au minimaliste CD fort bien présenté.
Nous sommes donc réunis la nuit tombée dans le chœur d'une cathédrale pour l'enregistrement de la quarante-douzième version du Requiem de Fauré. Celle avec chœur, enfant, baryton et orgue seul, celle qui fait pas de chichis. Le chœur est au point, juste, je chef, chanteur lui même connaît son boulot, quand à l'organiste, superbe comme à l'accoutumée, il est là par amitié et parce qu'il est un peu chez lui
Le premier soir tout se passe bien, on fait les prises sans problème, deux par numéro, pas plus, et comme tout va bien on remet au lendemain deux ou trois bricoles mais hélas aussi ce Pie Jesu qui tititlle les rombières...
Le lendemain soir tout le monde arrive fringuant, plein d'énergie. Le petit soliste a été préparé : même pas le trac. On commence par les bricoles et quelques raccords de la veille et l'on passe au Pie Jesu. Le bambin pré-pubère répète sans problème de sa voix cristalline mais à peine le Revox lancé, entonne en soprano son solo angélique pour virer sans prévenir baryton -martin au milieu du "dona eis requiem"...
Étonnement, effondrement du garçon puis généralisé, pleurs car il sent bien qu'il a foutu le bordel avec sa mue sournoise... et catastrophe, car comme on dit aujourd'hui il n'y a pas de plan B et que le temps c'est de l'argent...
C'est à la fois tragique et d'une drôlerie sans nom car à cette âge là à moins de leur avoir fait le coup de la Sixtine, y a des risques, des dangers de chaque instant ...
Antonia meurt d'avoir chanté en bravant l'interdit, le gamin qu'au contraire on incite, meurt de honte pour une poussée d'hormones...
Ce monde est sans pitié et les chanteurs fragiles...
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