Ceux qui ont fréquenté le quartier Maubert dans les années 70 se souviennent des trois ou quatre épiceries extrêmes orientales où l'on trouvait, c'était rare à l'époque,du nuoc mam et de la sauce soja au litre, de l'huile de sésame, ces galettes de riz dont je faisais moi-même mes nèmes et mes rouleaux de printemps, quelques légumes invraisemblables et un tas de produits de base pour se faire globalement une bouffe d'inspiration vaguement chinoise et bien sûr déjà, de l'excellente bière Tsing Tao. Le treizième arrondissement en pleine construction n'était pas encore l'étonnant chinatown qu'il est maintenant devenu.
On l'appellera Mme Van Huin, et elle tenait l'une de ces boutiques. C'est à dire que posée telle un "gardien du foyer" derrière sa caisse à l'entrée du magasin, elle surveillait,sans caméra aucune, le client jusqu'au fond de sa boutique et calculait sans jamais se tromper le contenu du petit panier de métal que vous lui présentiez, inutile en revanche de lui demander un renseignement ou un conseil sur l'utilisation d'un produit... Elle était curieusement, altérité oblige, profondément antipathique, tant elle était caricaturale, comme sortie directement du Lotus Bleu de Hergé. Elle portait sur sa tenue traditionnelle boutonnée jusqu'au cou une blouse blanche d'épicière toujours impeccable, et lorsqu'elle se laissait aller rarement à sourire, c'était comme un regret, au vu de ses dents en or, de n'en avoir comme tout le monde que trente-deux, pas plus...
Arrivèrent, fin de guerre du Viet Nam, exils, horreurs cambodgiennes, et autres joyeusetés sous continentales, les boat-peoples par vagues. Madame Van Huin ajouta alors une branche des plus florissantes à son petit commerce pourtant déjà prospère.
Je la surpris un jour, revenant dans sa boutique, trois minutes à peine après l'avoir quittée pour acheter je ne sais quoi que j'avais oublié, une loupe de bijoutier fixée à l'œil gauche évaluant en experte une bague qu'une de ses compatriotes fraîchement débarquée était entrée lui vendre dès que j'étais sorti.
On l'appellera Mme Van Huin, et elle tenait l'une de ces boutiques. C'est à dire que posée telle un "gardien du foyer" derrière sa caisse à l'entrée du magasin, elle surveillait,sans caméra aucune, le client jusqu'au fond de sa boutique et calculait sans jamais se tromper le contenu du petit panier de métal que vous lui présentiez, inutile en revanche de lui demander un renseignement ou un conseil sur l'utilisation d'un produit... Elle était curieusement, altérité oblige, profondément antipathique, tant elle était caricaturale, comme sortie directement du Lotus Bleu de Hergé. Elle portait sur sa tenue traditionnelle boutonnée jusqu'au cou une blouse blanche d'épicière toujours impeccable, et lorsqu'elle se laissait aller rarement à sourire, c'était comme un regret, au vu de ses dents en or, de n'en avoir comme tout le monde que trente-deux, pas plus...
Arrivèrent, fin de guerre du Viet Nam, exils, horreurs cambodgiennes, et autres joyeusetés sous continentales, les boat-peoples par vagues. Madame Van Huin ajouta alors une branche des plus florissantes à son petit commerce pourtant déjà prospère.
Je la surpris un jour, revenant dans sa boutique, trois minutes à peine après l'avoir quittée pour acheter je ne sais quoi que j'avais oublié, une loupe de bijoutier fixée à l'œil gauche évaluant en experte une bague qu'une de ses compatriotes fraîchement débarquée était entrée lui vendre dès que j'étais sorti.
Faut bien vivre comme disait Boris Vian !
RépondreSupprimerAh si j'avais un franc cinquante, j'aurais bientôt deux francs cinquante...
D*