11 février, 2012

Lee van Cleef à Saint Jean D'Angély

J'étais en quatrième. Avec mes copains Roger et Yvon, nous avons décidé d'aller à Royan à bicyclette. C'était en 1963, nous avions quatorze ans. Les temps ont bien changé car je n'imagine pas aujourd'hui des parents lâcher leurs gamins en plein mois d'août pour tracer, seuls, 170 km sur une route nationale (sauf dans le but inavouable de s'en débarrasser).
Ma mère nous avait loué une tente pour trois personnes à "La Hutte", rue du Marché, et comme l'objet devait peser le poids d'un abri de jardin, il a fallu se le répartir. Nous avions nos gourdes en métal, avec de l'antésite, un petit réchaud Camping Gaz, une petite poêle, une petite casserole, nos timbales nos assiettes nos couverts tout-en-un.
Nous avions prévu de faire le voyage en deux étapes. Et partis de Poitiers le matin dès l'aurore nous avons roulé toute la journée. J'aurais jamais dû faire ça, car j'étais à l'époque rétif à tout effort physique de longue durée... Plus sprinter que coureur de fonds si vous me suivez. J'en ai chié... Car mes deux potes, en plein trip Saint Exupéry, avaient le culte du surpassement. Une horreur ! Bien sûr, c'était pas le Tourmalet, mais n'empêche, entre Poitiers et Royan, même si de toute évidence ça descend vers la mer, ce n'est qu'un faux-plat, du début à la fin et, vous me croirez si vous voulez, dans les deux sens.
Une pause midi à Saint-Maixent, ville des "sous-officiers d'active", et nous sommes arrivés à Saint Jean d'Angély, au camping, vers les dix-huit heures. Monter la tente, ça a été ; on l'avait déjà montée une fois avant de partir. A la suite de quoi, nous sommes allés bouffer un sandwich avec un demi panach dans un rad du genre où il y a de la sciure de bois le long du bar. A l'époque on servait dans les bistrots les mineurs sans barguigner. A côté : un cinéma, Rex, ou Majestic, je sais plus, façon "Dernière Séance". C'était un samedi soir et on passait un western... Oh, pas un western mythique, non, un western de série z en noir et blanc. Un nanard invraisemblable dont j'ai un jour retrouvé le nom avant de l'oublier définitivement. Moi, les westerns, même les pires, je suis preneur. Et, comme souvent, y avait un méchant, très méchant. C'était, je ne l'ai su que deux ans plus tard en voyant mon premier Leone/ Eastwood, l'étonnant Lee van Cleef. C'est donc à Saint-Jean d'Angély, ville à cognac, que j'ai rencontré Lee van Cleef pour la première fois. Il y avait dans la salle, à quelques rangs de nous, un petit couillu déjà bien pochetronné qui dès qu'une des (rares) comédiennes du film apparaissait à l'écran, l'invitait cordialement "à lui sucer la bite". Ça a duré tout le film.

Quand nous sommes rentrés au camping, vu qu'on a pas pu éviter l'orage qui nous guettait, on s'est retrouvé trempés, à essayer de nous changer pudiquement dans la tente.
Trois garçons pubères et humides dans une tente en plein été après huit heures d'effort suivies d'une bonne averse... Je peux vous dire que le matin, ça imprègne !


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