C'est vers 1975 que d'un seul coup en province, tout ça explosa. Les jeunes homos ne sortirent pas du placard, non, ils refusèrent d'y entrer, entraînant dans leur folie libératrice quelques uns de leurs glorieux aînés. Je me partageais à l'époque entre Poitiers et Paris et n'entendais pas, dès que le "Drapeau" ou un quelconque Corail m'eut déposé à la gare renoncer à quoi que ce soit de ce que Paris m'offrait la semaine. Bien entendu, il n'y avait pas de boites, pas de bars homos en centre ville, il fallait à l'époque aller à Tours ou curieusement à Rochefort pour s'encanailler au plus proche. Mais le printemps venu et ce jusqu'à octobre, la nuit tombée, les jardins de Poitiers s'égayaient... A l'époque il y avait deux lieux de drague urbains séculaires et emblématiques, l'un comme dans beaucoup de ville de France, situé près de la Gare au monument des Coloniaux et l'autre en bordure du Clain, près des anciens abattoirs et nommé, de par cette situation, la Petite Villette. Le rituel, quand on était motorisé était (seul ou en co-voiturage !) de se rendre d'un lieu à l'autre, histoire de multiplier les chances de rencontres à conclure... Oh, bien sûr, comme au fast-food en plein essor, on pouvait consommer sur place et on ne s'en privait pas... mais le but était quand même de ramener chez soi le compagnon d'un soir en attendant de trouver celui de votre vie... Tout le monde se connaissait et le coming-out était tellement à l'ordre du jour qu'on voyait se garer sans vergogne sur le parking avoisinant les bagnoles de notables de toute la région, toutes sensibilités politiques confondues arborant parfois leur cocarde et dont certains étaient mes potes... Ce qui donnait lieu à l'intérieur du jardin à de fort courtois autant qu'humoristiques "Bonsoir, Monsieur le Député !", "Bonsoir Monsieur le Conseiller Général", "Bonsoir Monsieur le Maire"...(pas celui de Poitiers, je précise....), quand ce n'était pas du "Cher Maître" ou du "Cher Docteur" ! Il y avait aussi les surnoms... la "Camomille" grand blond dégingandé qui poursuivait à coups de parapluie son amant dans le jardin des Coloniaux pour le faire rentrer à la maison, il y avait "la Comtesse" nommé ainsi car il ne se prenait pas pour de la merde, la "Pâquerette" pourtant poilu comme un primate et infirmier de son état... et tant d'autres que j'ai oubliés. Je devais sûrement avoir le mien, de sobriquet, moi aussi... L'été, en fin d'après midi, toutes les folles du coin (il y en avait beaucoup plus, à l'époque ) venaient provoquer le bourgeois à la terrasse des bistrots de la " Place d'Armes". L'un de mes bons copains troquait dès sa sortie du bureau son costard cravate contre une djellaba translucide, aux doigts, aux poignets et au cou, bagues, bracelets et colliers, bref, babioles et colifichets à faire pâlir de jalousie les rombières alentour... Et finalement tout se passait plutôt bien...
Le problème c'est que tous ces frappadingues, quand le danger se fit pressant, crurent pour la plupart que le virus était un truc de parisiens qui ne traversait pas le périphérique sud . L'hécatombe à été terrible...
Le problème c'est que tous ces frappadingues, quand le danger se fit pressant, crurent pour la plupart que le virus était un truc de parisiens qui ne traversait pas le périphérique sud . L'hécatombe à été terrible...
Tu nous parles d'un (joli) temps que les moins de vingt ans...
RépondreSupprimerTu veux dire,hélas,les moins de quarante ans...
RépondreSupprimerje crois bien que tu es le seul rescapé . je pense souvent à ceux que j'ai connus et merde.. merde merde
RépondreSupprimerNon, je suis pas le seul, j'en connais encore au moins un qui apparaît parfois sur un certain site. Il m'a l'air, Dieu merci, en pleine forme !
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